Elle m'avait dit d'être là à 15 heures; "Tu en auras pour 3 heures environ", avait-elle précisé. J'étais ponctuel au rendez-vous: à 15 heures tapantes je sonnais au 12 de la rue Lamartine. C'était une bâtisse moderne à un seul étage, avec une profusion de vitres fumées qui laissaient passer la lumière mais ne laissaient rien filtrer de ce qui se passait en dedans. Une jeune fille, assez mignonne dans sa blouse bleue pâle, vint m'ouvrir et me regarda longuement, attendant que je me présente.

• "François Caleja; j'ai rendez-vous à 15 heures."
• "C'est exact. Je vous en prie," dit-elle en s'effaçant devant moi. A sa suite je pénétrai dans une sorte de bureau d'accueil. Elle consulta un registre.
• "Monsieur Caleja, vous êtes envoyé par Mademoiselle Leroy. J'ai besoin de connaître votre taille vestimentaire ainsi que votre pointure." Je les lui donnai, tout en me demandant à quoi cela pouvait lui être utile. Elle sortit et revint quelques instants après avec deux paquets.
• "Voici la tenue que vous devrez porter ici; il s'agit d'un ensemble veste et pantalon de plastique ainsi qu'une paire de sabots. Je vais vous indiquer une cabine où vous pourrez vous changer. Une fois revêtu de votre nouvelle tenue, passez dans la salle d'attente. Pendant tout votre séjour ici vous porterez le numéro de votre cabine de déshabillage, le A4. Par ici s'il vous plaît."
• "Que puis-je garder comme sous-vêtement", demandais-je en la suivant vers ma cabine.
• "Rien du tout: aucun sous-vêtement; pas de chaussettes. Et retirez montre et bracelets. Une fois changé, passez dans la salle d'attente qui se trouve en face de votre cabine; on vous appellera. Surtout retenez bien votre numéro: A4. Nous y voilà; entrez là", dit-elle en me désignant la cabine. J'étais sur le point de la questionner, de lui demander à quoi tout cela rimait, mais je n'en eu pas le temps. Elle me poussa dans la cabine et referma la porte sur moi. Tout cela m'intriguait beaucoup. J'ouvris le sachet: dans le premier il y avait un ensemble de sudation en plastique bleu marine que j'enfilais; dans le second une paire de sabots, bleu marine également. Je compris alors pourquoi l'hôtesse m'avait demandé ma taille et ma pointure. Le contact du plastique froid sur ma peau me fit frissonner, mais cela n'était pas désagréable. Ainsi vêtu, je sortis et me dirigeai vers la salle d'attente, en me demandant ce que j'allai bien pouvoir y trouver. Pourquoi cette tenue particulière? Serai-je le seul à attendre? Et surtout à attendre quoi? Poussant la porte, j'entrai. Trois personnes s'y trouvaient déjà, deux femmes et un homme; tous étaient vêtus de la même manière: veste et pantalon de plastique et sabots. Seule la couleur différait: bleue pour les hommes, rouge pour les femmes. Je n'avais jamais vu auparavant tant de personnes habillées de la sorte et surtout rassemblées en un même lieu. Elles me dévisagèrent lors de mon entrée, mais tous trois eurent bientôt un sourire complice. Nous n'échangèrent pas un mot: le silence semblait la règle dans cet univers chaud et feutré. L'attente fut de courte durée; une voix sortit soudain d'un haut parleur:
• "A1 veuillez vous présenter porte 2; A4 veuillez vous présenter porte 3." Surpris, je remarquai alors au fond de la pièce quatre portes surmontées de chiffres. Une des deux femmes et moi même nous levâmes et nous dirigeâmes vers la porte qui nous avait été indiquée.
• "Savez-vous ce qui risque de nous arriver?, demandai-je à voix basse à ma voisine tout en essayant de cacher mon trouble.
• "Non, répondit-elle d'une voix où filtraient une pointe d'émotion et aussi de curiosité impatiente. C'est mon maître qui m'envoie ici pour me faire poser des accessoires, pour me faire "équiper", comme il dit. Et vous?"
• "Moi? Oh, c'est à la demande de ma fiancée; j'ai accepté de me soumettre à ses caprices et de réaliser un de ses fantasmes. Je ne sais pas à quoi m'attendre mais ,la connaissant, je suis prêt à tout..." Nous n'eûmes pas le temps d'en dire plus; les portes s'ouvrirent et j'entrai dans l'inconnu.