Un bar "dédié à la masturbation féminine"

[b:eci4ss93]Un bar "dédié à la masturbation féminine"[/b:eci4ss93], vraiment ? Non, juste un titre racoleur

On dit que le sexe fait vendre, mais ce n'est pas forcément vrai. Parfois, la seule promesse d'un peu de sexe suffit à faire vendre (du papier, des voitures, du trafic sur un site...). Aujourd'hui, c'est un concept somme toute classique mais bien emballé qui a attiré l'attention de notre chroniqueuse. Mais au final, rien de neuf, et surtout pas de masturbation féminine dans un bar.

Édité par Henri Rouillier

Le blog "Big Browser" nous met l'eau à la bouche avec une info apparemment révolutionnaire : en effet, le concept d'un bar "dédié à la masturbation féminine" a tout pour faire frétiller l'imagination, y compris l'imagination de celles et ceux qui n'ont pas lu l'article.

Le titre qui fait le tapin, fausse bonne idée

C'est ainsi qu'un copain m'a envoyé ce mail :

"Salut ! J'imagine que tu n'as pas pu passer à côté de ça : "Le premier bar dédié à la masturbation féminine a ouvert au Japon". Je ne risque pas de regarder ça au boulot, mais le titre est accrocheur :)"

Ah oui, ça, pour être accrocheur, il est accrocheur. Et super efficace : j'ai cliqué de suite sur le lien. Et pendant les deux secondes d'attente entre le clic et l'affichage de la page, j'ai vraiment imaginé un bar où les femmes pouvaient se masturber. Ça m'a laissée perplexe, évidemment, mais après tout pourquoi pas ?

Hélas, ce n'est pas aujourd'hui que j'apprendrai en quoi consiste un bar dédié à la masturbation féminine, puisque ce n'est pas du tout ça dont il est question dans l'article ; ce qui fait du titre choisi par Big Browser un parfait exemple de ce que nous autres, qui aimons à jargonner comme des imbéciles, appelons un titre "déceptif".

Le titre déceptif, c'est en quelque sorte le Wonderbra du contenu plat : comme des seins qu'on ferait artificiellement pigeonner pour faire croire que, non, ce n'est pas un 85 B qui jaillit du T-shirt mais un bon 90 C, le titre déceptif nous fait croire à l'existence d'un truc qui ne survivra pas au déshabillage. Ôtez le Wonderbra, il vous reste une paire de petits seins. Cliquez sur le titre déceptif, il vous reste un petit contenu.

Mais ne nous méprenons pas, et sachons apprécier les petits seins comme les petits contenus : un titre déceptif n'entraîne pas forcément un mauvais article, pas plus que le Wonderbra ne maquille obligatoirement des seins moches. Simplement, dans un cas comme dans l'autre, on nous promet un contenu qui n'est pas celui qu'on trouvera sous le déguisement.

Petits seins ou article plat peuvent donc se révéler très intéressants, mais il n'en reste pas moins que la publicité mensongère est assez pénible.

Un bar comme tant d'autres : seule la déco change

En l'occurrence, le Japon n'innove pas vraiment avec son bar : il s'agit tout bêtement d'un établissement où l'on peut boire un verre tout en discutant de masturbation féminine, le thème étant symbolisé par de grandes vitrines de sex-toys. En gros, c'est un endroit supposé "fun" où le matraquage sexo-ludique d'articles dédiés à la masturbation féminine encourage très logiquement les clientes à aborder le sujet ouvertement placardé sur les murs.

Alors c'est du travail propre, et je ne vous jette pas la pierre, Pierre : l'article de Big Browser fait brièvement le tour du concept (description, explications, réactions), mais au final on n'apprend pas grand chose, si ce n'est que, comme d'habitude, le marketing du cul est plus ou moins habilement maquillé.

Mais surtout, il est, comme ça se fait depuis quelques années, recouvert du désormais très convenu vernis sociologique et psychologique qui donne à n'importe quel commerçant(e) l'impression de vendre une révolution sexuelle alors qu'on se contente ici de fourguer des boissons probablement chères dans un bar décoré de bites à piles à des fashionistas persuadées d'incarner "l'Avenir de La Fâme" parce qu'elles viennent parler branlette en contemplant des sex-toys violets (sans oublier bien sûr qu'elles peuvent éventuellement les acheter ou du moins en faire la promotion gratuite).

Bref, nous voici face à l'énième bar à thème ouvert par un(e) énième opportuniste désireux-se de faire son beurre entre les cuisses des femmes crédules et fans de nouvelles "tendances".

Mais au-delà du caractère déceptif du titre de son article, qui nous a fait croire que le bar était concrètement dédié à la masturbation féminine, Big Browser se fait ici le relais d'une triste évidence : les boutiquiers n'enferment jamais aussi bien la sexualité féminine dans un carcan que lorsqu'ils prétendent la libérer.
il y a 12 ans

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