Alyssia, ma femme (3)

Catégories : Cuckold candaulistes cocu
Ce récit est la suite de : Alyssia, ma femme (2)
il y a 2 ans

Le mercredi, elle m’a appelé. Sur le coup de midi.

  • Alex ? Je voulais te dire… Ne m’attends pas ce soir. Benjamin a une opportunité. Alors on la saisit.
  • Tu rentres plus tard ou tu rentres pas du tout ?
  • Pas du tout. On va rester dormir là-bas.
  • Au petit castel ?
  • Au petit castel, oui. Pourquoi ?
  • Non. Pour rien. Vous auriez pu avoir envie de changer.
  • Ben, non, tu vois ! Dis-moi…
  • Oui ?
  • Toi, tu… ?
  • Si je vais venir ? Dans la chambre d’à côté ? Peut-être. Je sais pas encore.

Elle est arrivée toute seule. La première. En chantonnant. S’est aussitôt précipitée dans la salle de bains. Quand elle en est sortie, trois quarts d’heure plus tard, elle chantait toujours. Il a presque aussitôt surgi. Un long silence. Et puis…

  • Qu’est-ce t’avais de si important à me dire ?
  • J’avais envie de te voir. Tellement.
  • De me voir ou de te prendre un bon petit coup de queue ?
  • Oh, Benjie…
  • C’est pas ça, peut-être ?
  • Aussi, oui, mais pas seulement.
  • C’est loin vendredi. Alors pas question d’attendre jusque-là. Il te fallait ta dose. De toute urgence. Seulement moi, je sais pas…
  • Tu sais pas ? Tu sais pas quoi ?
  • Si j’ai envie.
  • J’m’en fous ! Je vais me servir sur la bête. Alors là !
  • Pas touche.
  • Laisse-moi la regarder au moins.
  • Mais alors juste regarder.
  • Promis.

Elle a ri. De son petit rire grêle haut perché.

  • Elle pointe. Et pas qu’un peu. Elle pointe vers là où elle crève d’envie d’aller. Hein, ma chérie, que tu veux aller leur rendre visite aux petits replis d’amour d’Alyssia ? Ah, tu vois, tu opines du chef. Oui. Oui. Et encore oui. Tu demandes que ça. Bon, ben tu sais pas, le mieux ? On s’occupe pas de Benjie. C’est un rabat-joie. Un vrai bonnet de nuit. On fait notre petite affaire toutes les deux. En douce. Ni vu ni connu.
  • T’as le droit de rêver.
  • Toi, tu te tais. Elle fait ce qu’elle veut. Elle a pas de comptes à te rendre. Fiche-nous la paix. On cause. Qu’est-ce qu’on disait ? Ah, oui ! Il a pas forcément tort, remarque ! Parce que, pour être honnête, c’est surtout pour toi que je suis venue. Et même, faut bien l’avouer, que pour toi. Pour que tu me remplisses bien. Que je te sente bouger en moi. T’y répandre. Depuis dimanche je pense qu’à ça. À écarter les cuisses, à t’accueillir et à me refermer sur toi. Si tu savais ce que c’est bon, par moments, de n’être rien d’autre qu’une chatte qui se fait bourrer…

Elle s’est tue. Un long silence.

  • Enfile-moi, Benjie ! Enfile-moi !

Elle a presque tout de suite gémi.

  • Elle me rend folle, ta bite. Qu’elle est bonne ! Oh, qu’elle est bonne.

Son plaisir a déferlé. En grandes vagues indéfiniment ressuscitées. Encore le silence. Des chuchotements. Un dernier feulement de satisfaction.

  • Je suis repue. Et je crève de faim.
  • Ça, ça devrait pouvoir s’arranger. Et sur le champ.

Elle en brûlait d’envie, mais, le lendemain, quand elle est rentrée, elle ne m’a pas posé tout de suite la question. Elle est d’abord allée cueillir du lilas au jardin. Elle a ensuite vérifié ses comptes, programmé un film, remisé au grenier un carton de vêtements d’hiver. C’est à table qu’elle s’est lancée.

  • J’ai pas arrêté de me demander hier, tout du long.
  • De te demander quoi ?
  • Si t’étais là, dans la chambre, à côté.
  • Ce qui a pas eu l’air de bien te déranger.
  • Donc, t’étais là.
  • Pour donner, ça a donné. Trois fois vous avez remis le couvert. Presque quatre.
  • Oui, oh, ben ça, avec lui, n’importe comment, c’était couru d’avance. Il me met dans de ces états !
  • Je vois ça. J’entends plutôt.
  • Je suis désolée, mais…
  • T’as pas à l’être. Tu l’es pas vraiment d’ailleurs.
  • Ce qu’il y a surtout, c’est que ça m’émerveille. Ça arrête pas de m’émerveiller. Parce que c’est vraiment le genre de type dont j’étais persuadée, quand j’étais ado, qu’il n’était pas pour moi. Qu’il ne serait jamais pour moi. Que c’était pas la peine que je lève les yeux dessus. Il me regarderait même pas. Et c’était vrai : j’étais transparente. Mes copines, elles, du moins certaines d’entre elles, elles pouvaient tout se permettre. Viser haut. Très haut. Les plus beaux, les plus virils, quand elles avaient décidé de les avoir, elles les avaient. Et ça leur paraissait tout naturel. Qu’est-ce que je pouvais les envier ! Combien de fois j’ai rêvé que le Lionel de Serena, c’était moi qu’il serrait dans ses bras. Combien de fois, en imagination, je me suis fièrement affichée avec lui ! Dans les bars. Au cinéma. Partout. Et tant d’autres. Christophe, qui les avait toutes à ses pieds. Cyrille, qui était beau, mais beau ! Que c’était pas possible d’être beau comme ça. Qui s’est tapé pratiquement toutes les filles de Terminale C, mais pas moi. Moi, je n’existais pas. Je n’existais jamais pour les garçons. Du moins ceux qui comptaient. Sauf dans mes rêves.
  • Tu as existé pour moi.
  • Bien sûr ! Tu étais si gentil. Si prévenant. Si attentif au moindre de mes désirs. Comment ne pas s’en sentir profondément émue ? Valorisée ? Et puis, à toi j’avais droit. Tu étais accessible. Je ne l’ai jamais regretté. Seulement…
  • Seulement c’est si fascinant l’inaccessible.
  • Voilà, oui. Et j’ai continué à jouer. À essayer de me faire croire. Sur Internet. Tu ne t’en es jamais rendu compte. C’était mon jardin secret. Pendant des années et des années je me suis bercée d’illusions. C’est tellement facile, comme ça, de loin. Tout est possible. Du moment qu’on ne cherche pas à se confronter au réel. Ah, j’en ai séduit des hommes improbables ! Qui finissaient presque toujours, évidemment, par solliciter une rencontre « en vrai ». Je tergiversais. J’éludais. Je savais trop bien comment ça allait tourner. Et ils se lassaient. Les uns après les autres.
  • Mais pas Benjamin.
  • Pas Benjamin, non. Qui a insisté. Qui a fini par me convaincre, à force de patience, d’accepter un rendez-vous auquel je me suis rendue la peur au ventre. Battue d’avance. Mais… Mais ses yeux. Mais son désir. D’un homme comme lui ? Pour moi ? C’était impossible. Invraisemblable. Et pourtant, si ! Je n’en revenais pas. J’existais pour lui. Pour un homme comme lui. Il me faisait être celle que j’avais toujours voulu être. Celle que j’avais cru que je ne serais jamais. Et c’est chaque fois le même miracle. Ses yeux. Sa queue qui me veut. Qui m’exige. Moi ! Tu te rends compte ? Moi. Je n’en reviens pas. Je n’en reviendrai jamais.

2-

  • Allô… Alexandre Jamier ?
  • Lui-même, oui.
  • Bonjour… Séverine Marvaut à l’appareil. Mon nom ne vous dit sans doute rien, mais il faut absolument que je vous parle.
  • C’est à quel sujet ?
  • C’est personnel. Et important. On pourrait se retrouver quelque part ?
  • Je déjeune à la Brasserie Antoine à midi. Vous voyez où c’est ?
  • J’y serai.

C’était une petite femme brune, la quarantaine, au regard sombre, qui s’est emparée, d’autorité, de la chaise libre en face de moi. Et qui n’y est pas allée par quatre chemins.

  • Mon mari me trompe.
  • J’en suis désolé pour vous, mais je ne vois vraiment pas en quoi ça peut me concerner.
  • En ce que j’ai tout lieu de penser qu’il me trompe avec votre femme.
  • Ah !
  • Excusez-moi d’être aussi abrupte, mais inutile de tourner autour du pot. Vous êtes cocu. Je suis cocue. Bon, ben voilà ! Vous ne dites rien ? Oui, vous accusez le coup, c’est normal. Moi aussi, au début. J’arrivais pas à y croire. C’était pas possible. Il m’a fallu une bonne semaine avant de pouvoir enfin regarder la réalité en face. Mais alors là ! Je l’aurais bouffé. J’étais prête à tout foutre en l’air. À le lui faire payer. Cher. Très cher. Heureusement que j’ai d’excellentes amies qui ont su me canaliser, me convaincre de laisser passer un peu de temps. De ne pas prendre de décision à chaud. Ça nous aurait avancés à quoi ? On se serait engueulés. Il se serait braqué. Moi, de mon côté, aussi. Ça aurait dégénéré. On se serait quittés. Séparés. Ce qui aurait été une monumentale connerie. Parce que je tiens à lui. Beaucoup plus encore que je ne l’imaginais. Et je suis bien décidée à me battre, bec et ongles, pour le garder. Et me battre pour le garder, ça veut dire, dans un premier temps, ne rien faire. Ne rien savoir. Ne pas faire de vagues. Parce qu’il va se passer quoi maintenant ? Ils vont vivre leur truc. Quelques semaines. Ou quelques mois. Le temps que leur désir s’émousse. Et moi, pendant ce temps-là, je vais tout faire pour que la vie à la maison soit la plus paisible et la plus harmonieuse possible. Pour que ce soit là qu’il ait envie d’être. Qu’il s’y sente bien. Pour que le jour où ça s’affadira entre eux, il y retrouve tout naturellement ses marques. Il n’y aura rien eu. Il ne se sera rien passé. Vous comprenez ?
  • Oh, que oui ! Mais si…
  • Ils tombent amoureux l’un de l’autre ? J’y ai pensé. Bien sûr que j’y ai pensé. C’est une éventualité qu’on ne peut pas écarter d’un revers de manche. Mais ça, j’aviserai, le moment venu. S’il arrive. Ce dont, connaissant Benjamin, je doute fortement. Il aime plaire. Il adore séduire. mais de là à s’attacher… Non. Ce sera un feu de paille. J’en ai l’absolue conviction. Voilà pourquoi je tenais tant à vous rencontrer. Le plus vite possible. Pour qu’en cas de découverte inopinée du pot-aux-roses, vous ne donniez pas, pris de court, un grand coup de pied dans la fourmilière qui provoquerait une onde de choc aux conséquences incalculables. Et catastrophiques.
  • Ce n’est pas vraiment mon style.
  • On ne sait jamais. La colère est parfois si mauvaise conseillère. Mais maintenant que vous êtes prévenu… Je peux compter sur vous ?
  • Pour ? Ne pas provoquer de cataclysme ? Laisser sagement leur histoire s’étioler et mourir de sa belle mort ? Absolument.
  • Parfait. Me voilà rassurée. Tenez ! Mon numéro de téléphone. Au bureau. On se tient au courant. Et, s’il survient quoi que ce soit qui change brusquement la donne, on s’alerte aussitôt. Toutes affaires cessantes.

Et elle est partie comme elle était venue.

3-

  • Jamais j’aurais dû t’en parler.
  • Mais si !
  • Je sais pas. T’as l’air toute préoccupée depuis. Presque soucieuse.
  • Mais non ! C’est pas ça ! C’est pas elle. C’est que j’ai mis le nez dans les comptes et… Tu tiens absolument à aller en Autriche cet été ?
  • Pourquoi ? On est dans le rouge ?
  • Pas vraiment, non. Mais on est bien un peu ric-rac quand même. Il suffirait qu’on ait deux ou trois imprévus.
  • Et alors ? Tu proposes quoi ?
  • Que, pour cette année, on reste sagement en France. Dans un arrière pays quelconque. Où on pourra tranquillement décompresser. Se reposer. Loin de la foule.
  • Et où ça ?
  • J’ai pas vraiment d’idée. L’arrière-pays niçois, par exemple.
  • Il part où, Benjamin, en vacances ?
  • Ça n’a rien à voir.
  • Il part où ?
  • À Nice.
  • Comme par hasard.
  • Oh, mais si on se voit, ce sera juste une fois comme ça. En passant. Peut-être deux. Trois grand maximum. Selon qu’il pourra se libérer ou pas. Et puis pas du tout, si ça tombe.
  • Tu vas lui dire ?
  • Quoi donc ?
  • Que sa femme n’est pas dupe.
  • Il y a pas de risques, non.
  • Parce que ?
  • Parce que j’ai pas la moindre idée de la façon dont il réagirait. Et que j’ai pas du tout envie de jouer avec le feu.

Il était dans l’annuaire. Benjamin Marvaut. 24, rue Marcel Pagnol. J’ai un peu tourné. Cherché. Dans des rues toutes identiques. Avec des maisons copies conformes les unes des autres. Toutes dans des tons ocre. Toutes entourées du même bout de terrain sur lequel rien n’avait encore eu le temps de pousser vraiment. La leur était la dernière. Dans une sorte de cul-de-sac. Au-delà un pré que bordait une route déserte. Je suis descendu de voiture. Je me suis approché. Les volets étaient fermés. Un vélo était couché dans l’herbe. Sur l’arrière, une tonnelle verte abritait une table de plastique blanc avec ses chaises. Je suis reparti. Au coin, accoudé à sa grille, un retraité m’a regardé passer d’un œil soupçonneux.

Il avait aussi un compte Facebook. Une centaine d’amis. Sportifs pour la plupart. Joueurs de foot. Férus d’athlétisme. Peu de femmes. La sienne. Quelques collègues enseignantes. Des photos. Beaucoup de photos. De voitures. Des courses de voitures. À en avoir la nausée. C’était tout. Rien d’autre. Nulle part.

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